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Divorce par censentement mutuel : vendre le bien avant pour éviter le droit de partage, pratique risuqée

Le 04 juin 2018
L’article 1091 du Code de procédure civile prévoit qu’à peine d’irrecevabilité, la requête en divorce par consentement mutuel doit comprendre « en annexe une convention datée et signée par chacun des époux et leur avocat portant règlement complet des effets du divorce et incluant notamment un état liquidatif du régime matrimonial ou la déclaration qu’il n’y a pas lieu à liquidation. L’état liquidatif doit être passé en la forme authentique devant notaire lorsque la liquidation porte sur des biens soumis à publicité foncière ».

Lorsque les époux sont propriétaires d’un bien immobilier, il arrive fréquemment qu’ils décident de le vendre avant d’engager la procédure de divorce et ce, afin d’éviter d’avoir à supporter le coût de l’intervention d’un notaire mais surtout le droit de partage de 2,5 % appliqué par l’administration fiscale sur la valeur nette du bien à partager.

La réalité juridique n’est pas si simple.

En l’absence d’acte, un partage verbal du prix de vente entre les parites n’est en principe pas soumis au droit de partage (CGI, art. 635, 1, 7°. – V. BOI-ENR-PTG-10-10, 30 mai 2014, § 90).

En application de ces dispositions, une réponse ministérielle dite « Valter » est venue poser le principe selon lequel « le partage verbal entre époux du produit de la vente d’un immeuble commun qui intervient avant un divorce par consentement mutuel n’est pas soumis au droit de partage » (Rép. min. éco n° 9548 à Valter : JOAN Q 22 janv. 2013, p. 825 ; RFN 2013, act. 31, J.-J. Lubin).

Toutefois, l’application de cette règle fiscale suppose qu’il ne soit fait aucune mention de la vente du bien ou de la répartition du prix de cette vente dans la convention de divorce.

Or, le principe dégagé par la réponse ministérielle « Valter » ne tient pas compte des règles civiles applicables à la liquidation des régimes matrimoniaux.

Il convient de rester prudent à l’égard de la portée de la réponse ministérielle précitée dans la mesure où seuls les commentaires publiés sur la base du « bulletin officiel des impôts » sont opposables à l’administration fiscale, ce qui n’est pas le cas de la réponse ministérielle « Valter ».

Il n’est donc pas possible d’affirmer de façon certaine que l’administration fiscale est liée par les termes de cette réponse.

Dès lors, le risque de requalification de ce type de pratique en abus de droit fiscal ne peut être totalement éludé.

L’abus de droit est en effet caractérisé lorsque l’acte en cause n’a pu être inspiré « par aucun autre motif que celui d’éluder ou d’atténuer les charges fiscales que l’intéressé, si ces actes n’avaient pas été passés ou réalisés, aurait normalement supportées, eu égard à sa situation ou à ses activités réelles » (l’article L 64 du LPF), ce qui semble bien pouvoir s’apparenter au cas d’époux qui, pour éviter d’avoir à s’acquitter d’un droit de partage, procèdent à la vente de leur bien immobilier commun pour s’en partager verbalement le prix peu avant d’engager une procédure de divorce.

Certes, l’administration fiscale risque de se retrouver en difficulté pour démontrer le véritable caractère de l’opération, mais le risque encouru par les époux résultant de cette incertitude juridique doit amener à la prudence dans la mesure où, en cas de redressement, sera appliquée une pénalité pouvant aller jusqu’à 80 %.

Afin d’éviter de s’exposer à de tels risques, l’alternative semble être d’opter pour un divorce accepté (C. civ., art. 233) aux lieu et place d’une procédure de divorce par consentement mutuel (C. civ., art. 230).

Choisir ce fondement aura pour effet de voir prononcer le divorce, puis, après avoir basculé sous le régime de l’indivision post-communautaire, d’opérer le partage verbal souhaité sans être taxé.

 

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